ALLOCUTION DU 26 AOUT 2004


« Gaby va se coucher dans l’herbe »
« Le chasseur est affamé » :

ces deux messages lancés sur les ondes de radio-Londres annonçaient aux réseaux de résistance des Maures et de l’Estérel le début de l’opération Anvil-Dragoon. L’armée de libération placée sous le commandement du général américain Patch allaient débarquer sur les côtes varoises le 15 août 1944.

La mission de libérer Toulon et Marseille est confiée au général français de Lattre de Tassigny qui a sous ses ordres environ 200 000 hommes (90 000 français et 110 000 « indigènes » : divisions d’infanterie algérienne et marocaine, division marocaine de montagne, division française libre, division d’infanterie coloniale venue d’Afrique noire, zouaves, légionnaires, spahis, chasseurs d’Afrique, commandos d’Afrique et tabors marocains). Précédés par les actes des résistants, les alliés libèrent villes et villages plus vite que prévu. C’est ainsi qu’ils arrivent à Gap le 20 août. Ce sont les résistants qui accueillent les commandos aéroportés américains de la Rugby Force et permettent leur progression grâce à leur parfaite connaissance du terrain et des positions allemandes.

A Toulon, ce sont les tirailleurs sénégalais qui jouent un rôle prépondérant dans la libération de la ville le 27 août.

L’insurrection de Marseille le 19 août contribue à destabiliser les forces allemandes et aboutit à la reddition de la ville le 28 août après l’intervention des tirailleurs algériens.

Les troupes auxquelles se sont joints des résistants progressent vers le nord.



Notre ville a été libérée le 26 août 1944, il y a tout juste 60 ans mais les seynois n’avaient pas attendu ce jour pour se rebeller et certains en payèrent le prix fort. Cette résistance quasi quotidienne se manifestait de diverses façons. Hommes et femmes prirent leur part : confection de colis destinés aux résistants détenus à la prison Saint Roch à Toulon ou internés dans le camp de Chibron, près de Signes, impression et distribution de tracts, manifestations contre les restrictions alimentaires, et dans le chantier naval aux mains des allemands, distributions de tracts, grèves, sabotages destinés à ralentir la production… Remercions ici celles et ceux qui oeuvrèrent dans l’ombre pour la libération de notre ville même si leur modestie doit en souffrir car certains sont parmi nous ce soir et continuent à porter témoignage auprès des plus jeunes. Après le débarquement allié, les allemands détruisent le chantier et les quais.

Dès le 19 août, des accrochages ont lieu entre les résistants et les soldats allemands.

Le 21 août, quelques uns sont faits prisonniers et enfermés dans le commissariat de police. Une patrouille allemande attaque le commissariat pour les délivrer. A la fin de l’affrontement, trois policiers ( Jacques Brès, Xavier Franceschini et Maurice Marcoul ) sont fusillés.

Le 26 août 1944 au soir, La Seyne endeuillée, sinistrée mais combattante est libre . Dans l’après-midi, la 7ème compagnie des tirailleurs sénégalais fait son entrée dans la ville et rejoint les résistants F.T.P.F. devant la Bourse du Travail, à quelques pas d’ici. Les 27 et 28, ensemble, ils font tomber les forts et fortins où les allemands étaient réfugiés. L’amiral allemand Rhufus capitule puis se suicide. Des centaines de soldats allemands sont faits prisonniers.

En hommage à la résistance et au combat de sa population ouvrière notre ville a reçu une citation à l’ordre du corps d’armée avec attribution de la Croix de Guerre avec Etoile de Vermeil .

Cependant La Seyne avait payé un lourd tribut à la folie nazie. Les victimes étaient nombreuses :
- De septembre 1939 à l’armistice de 1940 : 75 soldats tués, 456 prisonniers dont 11 morts en captivité.
- De mars à août 1944 : 261 civils tués et 463 blessés sous les bombardements.
- Enfin à la fin de la guerre on dénombrait en plus 15 résistants fusillés et 115 déportés dont 16 ne sont jamais revenus des camps de la mort nazis.

Sur les 5902 immeubles que comptait la ville 4310 étaient sinistrés dont 277 détruits.

Mais la reconstruction allait pouvoir commencer dans un pays qui avait retrouvé liberté et indépendance grâce à l’action conjuguée de la Résistance et des armées de libération.

Je terminerai en citant des extraits du journal du 117ème escadron de cavalerie américain très significatifs à ce sujet :

« Les opérations couronnées de succès de l’escadron peuvent être attribuées à l’ampleur considérable de l’aide matérielle apportée par le maquis français.
Ces patriotes ont fourni des informations précieuses sur les positions, les forces et les déploiements de l’ennemi.
Nombre de ces maquisards ont offert leur service et se sont rattachés à différentes unités. Ils contactaient des groupes qui agissaient en avant de nos troupes qui, ensuite achevaient de mettre l’ennemi en déroute.
Cette aide des plus précieuses apportée par ces maquisards était en fait une source d’inspiration ; leurs actes de bravoure étaient contenus dans la belle tradition d’un peuple amoureux de la liberté et donnant son sang pour libérer son pays des oppresseurs.
De simples mots ne peuvent décrire correctement leur contribution à la cause de la démocratie. Leurs actes resteront pour toujours dans les mémoires de chaque membre de l’escadron. »



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Pages réalisées par Louis VAISSE